Harisson entra d'un pas décidé dans le club. C'était le week end, il n'avait pas une dur journée à oublier. Il voulait juste passer un peu de bon temps. Et, en l’occurrence, du bon temps avec un, voire plusieurs, verre d'alcool. Il connaissait si bien les lieux que, lorsqu'il entra, le videur, à l'entrée, le salua d'un signe de tête amical. Etant donné le type de club qu'était le White Queen, beaucoup aurait pu s'en inquiéter, et même se demander s'ils n'étaient pas un peu pervers sur les bords. Mais pas Harisson. Le sorcier avait pleinement confiance en lui, et savait que lorsqu'il venait, ce n'était pas uniquement pour reluquer les filles au corps de rêve qui se dénudaient en dansant sur la scène. Il salua donc le videur avec un sourire avenant. En règle générale, il préférait se montrer sympathique avec les employés des clubs qu'il fréquentait. Ainsi, il en obtenait parfois des informations intéressantes.

Il s'approcha rapidement du bar, pour distinguer les employés qui étaient présents ce soir au bar. En général, lorsque sa barmaid préférée, Rose, était présente, il préférait s'adresser à elle. Mais il ne l'apercevait nulle part : c'était probablement son jour de congé.

Il regarda alors les personnes qui se trouvaient dans le club. Aux pied de la scène, on avait toujours les mêmes personnes, qui ne quittaient pas les danseuses des yeux. Le groupe était bien évidemment à grande majorité masculine. Sur le coté, Harisson distinguait ce qui semblait être un enterrement de vie de garçon. A tous les coups, le plus éméché était le futur marié. Il détourna les yeux et chercha une table libre, un peu plus loin de la scène.

Rapidement, une serveuse vint le voir, et lui demanda s'il savait ce qu'il prendrait où s'il désirait avoir la carte. Harisson l'avait déjà vu plusieurs fois, mais il savait qu'elle n'avait pas été embauchée il y a si longtemps que cela. Elle s'appelait Jenn, ou Jenny. Ou quelque chose dans ce gout là. Il ne s'en souvenait plus vraiment. Quoi qu'il en soit, il savait ce qu'il voulait. Un simple verre de whisky, sans glace. Il le commanda et, attendant que son verre arrive, il se laissa absorbé par la blonde qui dansait, non loin de lui.

Casilda avait dormi jusqu’à midi avant de se rendre à sa galerie d’art, "The Siren". La vie professionnelle était quelque chose de tout nouveau pour la démone, mais cela ne la brusquait encore pas trop : elle y allait quand bon lui semblait, fermait la boutique dès qu’elle commençait à s’ennuyer, prenait des vacances dès qu’elle avait besoin de soleil… Ce n’était pas l’argent qui lui manquait de toute façon! Toutefois, la belle artiste avait passé une agréable journée dans sa galerie, contente de voir que son travail plaisait. Elle avait vendu trois de ses tableaux et avait été approchée pour une exposition dans les mois à venir. Elle avait reçu beaucoup de compliments sur son travail "original" qui "sortait de l’ordinaire", ce qui ne pouvait que la rendre fière et satisfaite. C’était une femme qui méprisait les humains, sauf quand ceux-ci étaient élogieux envers elle.
Après avoir fermé à 19h, elle était rentrée chez elle et avait écouté de la musique classique dans son bain, en improvisant des notes mélodieuses et envoûtantes, qui auraient fini par noyer quiconque se serait trouvé avec elle. Puis, au bout de plusieurs heures passées seule dans son appartement de luxe, la belle démone décida de sortir pour aller s’amuser. C’était le weekend, les boites de nuits et pubs seraient blindés de jeunes hommes prêts à égorger. Cassy se mit donc sur son 31, bien qu’elle n’avait jamais besoin d’en faire trop pour faire baver les gens. Elle opta pour une robe courte, noire et sans bretelles de chez Gucci ainsi que pour des Louboutins noires. Elle laissa par ailleurs ses cheveux au naturel, c’est à dire longs et ondulés, avant de se maquiller légèrement afin de se sentir encore plus parfaite que d’habitude.
Puis, elle se rendit en ville et choisit finalement de se rendre au White Queen, un club de striptease où elle allait souvent. Elle provoquait un peu ses crises de colère toute seule, car elle savait très bien que la majorité des hommes à l’intérieur seraient grossiers envers les jeunes femmes se dénudant. Mais qu’importe, elle aimait s’amuser; elle aimait danser, séduire et tuer.

Une fois arrivée au White Queen, Casilda se posa sur une table, non loin d’un groupe d’hommes qui fêtaient apparemment un enterrement de vie de garçon. Tout le monde était joyeux, rigolant et criant toutes sortes de choses aussi dénuées d’intérêt les unes que les autres. Casilda regarda avec dégoût la façon dont le futur marié, au centre de son petit groupe, se laissait toucher par une jeune stripteaseuse aux formes avantageuses. Cela lui rappelait combien les hommes étaient des chiens, et ce même quelques jours avant leur mariage. Puis, elle décida de se lever afin de se rendre au bar. C’est alors que le petit groupe l’interpella.

« Hey chérie t’es toute seule? Viens un peu avec nous ! Allez quoi ! »

« Ouais viens !! Ouais !! Allez poupée ! Monte sur scène, monte sur scène !» criait un autre, frappant dans ses mains, visiblement très alcoolisé.

Casilda leur offrit un sourire forcé ainsi qu’un regard provocateur, rentrant dans leur jeu.

« Salut les gars… Vous êtes chauds ce soir, hein? Qui est le marié? »

Plusieurs "moi" s’élevèrent avant de finalement laisser place au réel marié.

« C’est moi. Et ça me désole un peu d’ailleurs, quand je vois une aussi belle créature! »

Casilda s’était mise à rire avant de le remercier et de leur souhaiter une bonne soirée. Elle était ensuite allée boire un verre au bar lorsqu’elle vit le futur marié se rendre aux toilettes. Finissant d’un coup sec son martini, la démone se leva de son tabouret, rentrant à son tour dans les toilettes.

« Hey! Tu m’a fais peur. Tu passes une bonne soirée? C’est les toilettes pour mecs ici tu sais. » avait dit l’humain tout en se lavant les mains et en regardant Casilda dans la glace.

C’est alors que l’envoûtante démone se mut jusqu’à lui, plongeant son regard de feu dans le siens.

« Je ne me suis pas trompée. Je voulais te voir… Tu me plait beaucoup tu sais. »

Elle s’était désormais collée à lui, posant ses deux mains sur son torse.

« Dis-moi, et si tu profitais encore un peu de ton célibat avec moi? »

L’homme ne se fit pas prier, il plongea brusquement sur la Sirène, l’embrassant fougueusement. La démone n’était guère étonnée, elle savait comment les hommes étaient. Mais, en faisant cela, il venait de signer son arrêt de mort. S’il l’avait rejetée, peut-être aurait-elle pu lui faire une fleur et le laisser en vie. Cependant, il l’embrassait violemment, comme un chien, comme s’il n’avait jamais eu aucune intention de se marier. C’est alors que Casilda sortit un poignard de son sac à main et le poignarda dans le ventre. L’homme se recula vivement, la bouche grande ouverte de douleur et de stupéfaction. Casilda se rua sur lui, lui griffant le visage avant de se téléporter en Enfers –car son pouvoir ne marchait que de la terre aux enfers et inversement- puis finalement dans une ruelle déserte de San Francisco. C’est là qu’elle le jeta à terre avant de reprendre son poignard pour le frapper de nouveau, cette fois-ci près du cœur. Elle regarda quelques secondes l’homme qui gesticulait à terre, avant de reprendre son couteau, de le nettoyer, et de faire le chemin inverse pour retourner au club, laissant le futur marié mourir seul.

Elle s’était téléportée dans un cabinet des toilettes des filles et en sortit comme si de rien n’était, rejoignant le bar et offrant un large sourire au barmaid au passage. Combien de temps s’était-il écoulé depuis qu’elle était rentrée dans les toilettes des hommes et son retour ici? Trois minutes? Quatre peut-être? Tout était allé très vite, comme à son habitude. Casilda faisait les choses rapidement, mais proprement. Puis, soudain, elle aperçu Harisson Graham à l’autre bout du club, assis seul à une table. Un sourire s’afficha immédiatement sur les lèvres de la Sirène, qui décida d’aller le rejoindre, demandant préalablement à la serveuse de lui apporter son second martini à cette table-ci. Casilda regardait son "ami avec bénéfices" qui semblait hypnotisé par une femme blonde dansant prêt de lui. La démone, passant près d’elle, lui lança un regard des plus noirs et lâcha un glacial « Bouge. », avant de s’asseoir à côté d’Harisson.

« Alors trésor, on vient admirer les jolies filles? Tu aurais pu me dire que tu venais quand même! »

Elle avait dit cela comme si de rien n’était, comme s’il était totalement normal qu’elle vienne taper l’incruste de la sorte. Un sourire amusé était affiché sur ses lèvres, ravie d’être celle qu’Harisson regardait à présent.

Tout absorbé qu'il était par la danseuse blonde qui était à seulement quelques pas de lui, Harisson ne se rendit compte de la présence de Casilda que lorsque la sirène avait enjoint à son spectacle d'aller ailleurs. Celle-ci n'avait d'ailleurs pas tarder à s’exécuter quand l'ordre avait été aboyé, très probablement par peur que Casilda ne la morde. En effet, pendant un temps, le sorcier eut l'impression que son "amie" était de fort mauvaise humeur. Presque sur le point de tuer quelqu'un. Toutefois, quand elle s'assit à coté du lui, son expression, et sa façon de parler avait changé du tout au tout. Désormais, elle semblait avenante, heureuse.

L'électropathe ne chercha même pas à comprendre ce qui lui passait dans la tête. Cela faisait des années qu'il avait cessé d'essayer de comprendre comment raisonnaient les femmes. Quant aux démons, il savait depuis sa plus tendre enfance qu'il n'y avait rien de logique dans leur comportement. L'un dans l'autre, il ne comptait pas perdre son temps à tenter de déchiffrer l'esprit d'une démone. Il n'y parviendrait très certainement jamais.

« Oui, je suis venue voir des jolies filles, mais je ne m'attendais pas à tomber sur la plus belle que je connaisse. »[

Ne sachant pas si la bonne humeur de la sirène était feinte, Harisson préférait commencer avec un compliment. D'autant qu'il n'avait pas vraiment besoin de se forcer. Il était vrai que Casilda était magnifique. Diaboliquement magnifique, pour être exact. Et elle était consciente de cela, et de l'effet qu'elle avait sur les hommes, lui y compris.

« Je t'aurais dit que j'étais ici si j'avais été au courant venait aussi. Mais comme tu ne me tiens pas non plus au courant de tes faits et gestes... Je suppose que nous sommes condamnés à nous rencontrer ici que quand le hasard en décidera ainsi. »

De toutes façons, quand ils se donnaient rendez-vous quelque part, il ne pensait pas au White Queen. Bizarrement  Harisson aurait pensé que l'endroit aurait tendance à agacer la sirène, de par le comportement de la majorité des représentants de la gente masculine qui étaient dans le club. Car, même si le White Queen n'était pas le plus mal famé des clubs de strip-tease, les clients n'étaient pas toujours des moins sexistes.

La réponse d'Harisson arracha un sourire à Casilda, qui aimait être flattée. Alors comme ça, elle était la plus belle femme que le sorcier connaissait? Il faut dire que cela n'étonnait guère la démone, qui était magnifique par nature. C'était inscrit dans son ADN, à l'instar des vampires qui avaient des crocs ou encore des fées qui avaient des ailes. Toutefois, même s'il s'agissait là d'une vérité évidente, cela ne manquait jamais de faire plaisir à la sirène, qui adorait qu'on lui fasse des compliments.

*Je l'ai bien dressé celui-là!* pensa t-elle, fier d'elle.

Cependant, Casilda se demandait si son ami était vraiment sincère: les hommes n'étaient jamais tout à fait honnêtes, c'était bien connu. Ainsi, prenant une pose décontractée sur la banquette qu'elle venait de s'emparer, Casilda répondit, un sourire flatté inscrit sur les lèvres:

"Merci Harisson, cela me va droit au... cœur."

Elle lâcha un petit rire cristallin, amusée de la situation. Il faut dire que Casilda n'avait pas eu beaucoup de cœur ce soir, en laissant pour mort un futur marié dans une ruelle, à plusieurs kilomètres d'ici. Les apparences étaient si trompeuses... certains la croyait si douce, si innocente! En réalité, elle était un monstre inhumain, et son cœur était aussi noir que les ténèbres.

"Mais dis-moi mon cher Harisson, dis-tu cela par peur, par sincérité, ou bien pour te jouer de moi?"

Un sourire amusé avait désormais pris place sur son visage de femme fatale, et Casilda ne lâchait pas son ami des yeux. Ce dernier l'amusait beaucoup, la démone appréciait leur relation de chien et chat, cela rajoutait un peu d'action car on ne savait jamais comment la soirée se finirait. Au même moment, la serveuse arriva avec un whisky et un martini, posant les deux verres sur la table.

"Et bien on peut dire que le hasard fait bien les choses, je suis ravie de te trouver là. A la tienne." dit-elle en trinquant son verre avec celui d'Harisson, tout en lui jetant un regard de braise.